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Commentaire![]() Texte difficile s'il en est, ce livre na pas terminé de faire controverse et suscite parmi les lecteurs nombre d'interrogations et des polémiques assez tranchées.
Une forte critique s'exprime sur la méthode et les thèses d'Hannah Arendt. Ce qui devait être un reportage sur le procès est devenu un rapport sur la banalité du mal, terme qui n'apparaît d'ailleurs que dans le post-scriptum. Il est reproché à l'auteur d'avoir été fascinée par Eichmann, d'avoir voulu couvrir ce procès pour voir ce criminel de guerre. Mais elle n'aurait suivi qu'un dixième du procès, pendant trois semaines, et a pris le reste dans des articles. Il faudrait voir le film complet du procès, qui montre beaucoup plus de choses. La dimension historique est également contestée – en particulier le rôle des conseils juifs – on aurait depuis ce livre un nouveau recul sur les événements, à partir de l'ouverture d'autres sources. On connaît également le nombre et la virulence des ennemis que l'auteur s'est fait de par sa position antisioniste.
Mais bien sûr c'est le terme même de banalité du mal qui atteint le plus les sensibilités et suscite de fortes réactions parmi les lecteurs. Eichmann est-il vraiment cet homme ordinaire tel qu'il se présente lui-même, et tel que le décrit Hannah Arendt : un petit personnage, un bureaucrate, un fonctionnaire. Ou cherchant à sauver sa peau, devient-il monstrueusement rusé et malin ? Et qu'est-ce que l'absence de pensée ? Eichmann est parfaitement capable d'organiser les déportations en train mais n'est pas capable de penser ce qu'il fait. Des milliers de fonctionnaires ont marché comme lui mais il y a eu aussi de la résistance, de la désobéissance. Hannah Arendt parle de morale, elle ne dit pas qu'Eichmann est stupide, elle ne l'excuse pas, elle le décrit.
D'aucuns restent hantés par ces questions, persuadés de leur actualité permanente. Dans nos activités ne portons-nous pas des objectifs et des protocoles auxquels nous n'adhérons guère ? Faut-il les refuser catégoriquement ou se dire que d'autres feront pire ? Certes on n'est pas dans l'extermination mais les choses à l'époque se sont amenées doucement, on pourrait dire qu'il ne s'agissait au début que de regrouper les juifs dans des conditions favorables.
Il est impossible bien sûr d'épuiser le débat sur un ouvrage aussi technique et aussi difficile, surtout dans ses thèses. On sait le tollé qu'elles ont soulevé, et soulèvent encore – on peut citer le film de Claude Lanzmann "Le Dernier des injustes" sur le rabbin Benjamin Murmelstein. Il faut à tout le moins reconnaître au livre le mérite de poser de vraies questions et de déclencher la réflexion, avec un parti pris de distance, de détachement, de précaution, d'absence de pathos. Et de traiter le problème le plus largement possible, y compris sous l'angle juridique, en développant avec précision les questions de force du droit international et de légitimité à juger.
Quoi qu'il en soit, on en revient toujours à la même question : un homme peut commettre les pires atrocités sous un visage ordinaire. A rapprocher de la thèse de Freud de la pulsion de mort ? Le mal serait banal, il nous incomberait de ne pas le banaliser … EventList powered by schlu.net Copyright © 2025 120 Grand'Rue. Tous droits réservés.
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