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Ouvrage 

Titre:
Le mur invisible
Auteur:
Haushofer (Marlen)
Edition:
Actes Sud
Réunion du:
08.01.2019

Commentaire

lemurinvisible

Marlen Haushofer (1920-1970) est une écrivaine autrichienne qui a écrit des nouvelles, des romans et des pièces de théâtre. Elle a été reconnue davantage après sa mort que de son vivant, notamment dans sa description du rôle particulier de la femme dans la société masculine de son temps. Ici elle s'attache au thème de l'individu en rapport avec la nature et avec les forces qui à la fois le font vivre et le détruisent, thème toujours d'actualité.

 

A l'invitation de ses cousins Louise et Hugo, une femme d'une quarantaine d'années se rend avec eux à la montagne, dans leur chalet situé à l'extérieur d'un village. Dès leur arrivée Louise et Hugo vont au village mais n'en reviennent pas. La narratrice ne tarde pas à s'apercevoir qu'un mur invisible la coupe désormais du monde, et commence à planter des branches pour le matérialiser. Au-delà de ce mur les êtres vivants ont été pétrifiés, les cadavres figés dans leur mouvement finissent pas tomber, plus rien ne vit sauf la végétation. Citadine, la narratrice connaît tout de même la vie à la montagne pour y avoir passé de longs moments. Elle prend peu à peu ses marques dans cet univers où elle se retrouve seule avec quelques provisions, avec une vache, un chien, des chats. Après s'être contentée au début de prendre des notes, elle fait au bout de deux ans le récit de sa vie.

 

Le récit est très bien écrit, prenant, la façon de raconter captivante. On est évidemment curieux de savoir comment le personnage déploie son énergie pour survivre, et l'auteure construit le suspense, presque comme dans un polar, en annonçant à l'avance la mort des animaux qui accompagnent la narratrice. L'écriture simple, sans effets, n'y est pas pour rien non plus : "Comment elle nous tient en haleine avec le lait de la vache, les pommes de terre et les haricots, le bois pour se chauffer l'hiver". L'hymne à la nature est omniprésent, et les relations aux animaux, ici devenues vitales, sont très belles.

 

C'est aussi un livre sur l'écriture, l'écriture qui devient la raison de vivre de la narratrice, l'écriture qui lui sert à créer un peu d'ordre dans la chronologie du quotidien, et à mener une réflexion sur elle-même. Elle découvre ses capacités à s’adapter, et aussi ses limites. Elle est libérée des contraintes d’une civilisation qui lui apparaît maintenant superflue, mais ce n'est pas la liberté absolue, bien sûr, elle est soumise à ses limites physiques et aux besoins de son corps. Elle se découvre elle-même, elle voit comment son expérience remet son identité en cause, elle constate à quel point elle a changé, combien lui paraissent vaines les conventions qu'elle suivait dans sa vie d'avant. Le temps devient artificiel, elle n'a de la date et de l'heure qu'une connaissance approximative, et ne peut évidemment rien projeter de son avenir. "C'est très convaincant, cela me démontre qu’on vit dans un monde du superflu, et me fait penser à toutes les personnes qui se sont retirées volontairement du monde". On pourrait presque lire entre les lignes que "c'est mieux de vivre seul avec des animaux que dans la civilisation". Au point qu'une lectrice s'interroge sur le prétexte que constitue la vache pour ne pas partir, explorer, voir jusqu'où le mur se déploie, comme si le personnage s'enfermait volontairement.

 

Le titre en allemand est "Die Wand", d'aucuns préfèrent la simplicité de ce mot sans le qualificatif d'invisible. Ce mur fait allusion à la guerre froide et aux tensions politiques de l'époque – le livre a été publié en 1963 – et le processus d'anéantissement à la guerre nucléaire.

 

Un film a été tiré du livre en 2012, avec quelques variantes (viol, importance de la voiture, …).

 

Référence est faite à un autre livre sur le même thème d'après la catastrophe, "Dans la forêt" de Jean Hegland, qui se passe dans le monde actuel et met en scène deux sœurs, à la marge de toute civilisation.

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Mise à jour le 13/03/2024